Le Donbass est devenu un enjeu géopolitique majeur depuis que le président américain Donald Trump a lancé une campagne pour parvenir rapidement à un accord de paix avec la Russie. Selon le New York Times, Washington tente de persuader Kiev de céder l'intégralité du Donbass à Moscou en échange d'un cessez-le-feu avant Noël.
La région a subi les plus grandes destructions et pertes humaines après l'invasion russe de 2014 et l'offensive de grande envergure qui a suivi en 2022. Le sort de Marioupol a été particulièrement tragique, où, selon le président Volodymyr Zelensky, les bombardements russes ont tué au moins 20 000 civils.
D'après les médias, le Kremlin n'envisage pas de mettre fin aux hostilités sans un retrait complet des troupes ukrainiennes du Donbass, y compris des villes fortifiées de Kramatorsk et Sloviansk. De son côté, Trump espère une fin de guerre avant Noël et laisse quelques jours à Kiev pour répondre sur la question des concessions territoriales.
La Constitution ukrainienne interdit tout transfert de territoire sans référendum national, quasiment impossible à organiser en temps de guerre. Toutefois, un référendum ne serait pas formellement requis si les autorités ordonnaient simplement le retrait des troupes de la région. C'est ce scénario qui, comme le souligne la publication, inquiète le plus les experts ukrainiens.
Mykola Beleskov, analyste à la fondation « Retour vivant », estime qu’une partie des militaires pourrait refuser d’obéir à l’ordre de retraite, ce qui risque de déstabiliser l’intérieur du pays. Il souligne que l’injonction de se retirer sans combattre sera perçue comme une humiliation nationale par de nombreux défenseurs. Selon lui, les batailles de Kramatorsk et de Sloviansk pourraient coûter la vie à des dizaines de milliers de personnes en Russie, et une retraite sans résistance aurait de graves conséquences pour la défense de l’Ukraine à l’avenir.
Beleskov prévient également que même le transfert du Donbass ne suffira probablement pas à stopper l'agression du Kremlin. Selon cet expert, Moscou ne cherche pas seulement à conquérir des territoires, mais aussi à infléchir la politique de Kiev, à empêcher l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN et à limiter les capacités de son armée. Par conséquent, tout « plan de paix » impliquant des concessions pourrait être exploité par la Russie pour lancer une nouvelle offensive.
La situation intérieure complique la position de négociation de Zelensky. Suite au scandale de corruption qui a entraîné la démission du chef de cabinet présidentiel, Andriy Yermak, les partenaires occidentaux suivent de près la stabilité du gouvernement ukrainien. Malgré cela, selon les médias, aucun signe de changement de la position de Kiev n'a été constaté. Le politologue Volodymyr Fesenko souligne que l'influence politique de Yermak était bien moindre qu'on ne le pensait.
Un autre point du plan américain est la tenue d'élections présidentielles en Ukraine dans un délai de 100 jours. Trump a déclaré que reporter les élections équivalait à un « manque de démocratie », mais Zelensky insiste sur le fait que le vote est possible dans un délai de 60 à 90 jours, à condition que la sécurité soit assurée et que les partenaires bénéficient d'un soutien adéquat.
L'ancien Premier ministre russe Mikhaïl Kassianov, aujourd'hui en exil, estime que Poutine est obsédé par l'idée d'un contrôle total sur le Donbass et cherche à obtenir une reconnaissance internationale de ses conquêtes. Il est convaincu que, pour le président russe, il s'agit d'afficher sa force et d'éviter de paraître faible.
D'après les experts, la pression exercée sur l'Ukraine en vue d'obtenir des concessions territoriales ne faiblit pas, mais de telles conditions comportent des risques pour la sécurité de l'État et l'unité de la société. Moscou continue d'insister sur un scénario qui impliquerait la capitulation de facto de Kiev à l'est.

