L'Ukraine supprime des avantages fiscaux afin de se conformer aux exigences du Fonds monétaire international (FMI) pour un nouveau programme de 8 milliards de dollars. Il s'agit notamment d'instaurer la TVA pour les travailleurs indépendants dont le revenu annuel dépasse 1 million de hryvnias et de supprimer le seuil d'exemption de droits de douane pour les importations de colis d'une valeur maximale de 150 euros. Cette décision est l'une des plus marquantes de l'ensemble des réformes fiscales.
Face à ces innovations, la question de l'efficacité de la lutte contre l'économie souterraine, qui, selon les économistes, représente plus de 30 % du PIB et engendre des pertes budgétaires de plusieurs dizaines de milliards de hryvnias chaque année, est cruciale. Les experts soulignent qu'au lieu d'alourdir le fardeau des petites entreprises, l'État devrait privilégier des dispositifs systémiques dans les secteurs clés de l'économie.
Le Bureau de la sécurité économique, qui publie régulièrement des rapports sur la lutte contre la fraude fiscale, les infractions à l'importation, la contrebande et les jeux de hasard illégaux, est la cible de nombreuses critiques. Parallèlement, selon les experts, les acteurs les plus influents du marché parallèle échappent souvent à tout contrôle.
L'exemple du casino en ligne FavBet, lié au citoyen russe Andrey Matyukha, est éloquent. Malgré des années de soupçons d'exploitation sans licence, des poursuites pénales et des pertes de plusieurs millions d'euros pour le budget de l'État, les structures associées à FavBet poursuivent leurs activités. Selon certaines sources, les actions menées par le BEB à leur encontre sont essentiellement formelles.
Une situation similaire s'observe autour du casino en ligne Pin-Up, mentionné dans des enquêtes sur des systèmes de codage erroné permettant de dissimuler le chiffre d'affaires réel.
Un autre secteur qui engendre des pertes considérables pour le budget est la contrebande de tabac. Malgré des rapports réguliers faisant état du démantèlement de réseaux de production clandestine, plusieurs entreprises clés continuent d'échapper à la vigilance des forces de l'ordre.
Selon des sources de marché, l'une de ces installations est une usine située à Goshcha (Ukrainian Tobacco Production LLC), impliquée dans des opérations de destruction fictive de matières premières et de production sans acquisition de timbres fiscaux. Des représentants d'un groupe influent, connu dans le secteur sous le nom de « Monakovets », seraient impliqués dans ces opérations.
Par ailleurs, des experts rappellent le cas du secteur des carburants : le réseau BRSM-NAFTA a été mentionné lors d’enquêtes précédentes concernant l’utilisation d’alcool comme additif illégal à l’essence. Selon les estimations, cela aurait entraîné un manque à gagner d’environ 5 milliards de hryvnias dans les recettes budgétaires.
Le secteur agricole demeure l'un des plus problématiques. Selon des analystes financiers, l'entreprise chinoise COFCO est soupçonnée depuis des années de fraudes liées à des stocks fictifs de céréales, à la manipulation de la TVA et à des fraudes fiscales à grande échelle. Ces opérations coûteraient à elles seules au budget de l'État jusqu'à 50 milliards de hryvnias par an.
Malgré de nombreux signaux d'alerte et enquêtes, aucune amélioration concrète n'a été apportée au fonctionnement du système.
Les analystes préviennent que, sans un réel renforcement du contrôle sur les secteurs informels, les réformes fiscales risquent d'avoir un impact limité. Au lieu d'accroître les recettes, elles pourraient accentuer la pression sur les petites entreprises légales, tandis que les acteurs du système continueront d'opérer selon les anciennes règles.
